Pourquoi faudra-t'il toujours des équipements de sécurité routière sur la route ?

Tout le monde le sait, pour l’avoir pratiqué, l’usage du portable au volant détourne l’attention du conducteur… Pour les chercheurs, il s’agit de « cécité d'inattention », une conséquence de la distraction cognitive causée par une conversation téléphonique.

Disséquons ensemble le phénomène : les conducteurs regardent bien à travers le pare-brise mais le cerveau ne traite pas l’ensemble des informations de l‘environnement de la route qui pourraient les aider à surveiller celle-ci efficacement, à identifier les risques potentiels et à anticiper l’inattendu. Bref, les conducteurs qui parlent en conduisant regardent les objets, mais ils ne les voient pas.

Les chercheurs considèrent que les conducteurs utilisant des téléphones « perdent» 50% des informations visuelles auxquelles ils auraient accès s’ils étaient totalement concentrés sur la route devant eux. La conversation téléphonique vient s’ajouter à une charge cognitive (avec d’autant plus d’intensité que la conversation est complexe ou à forte connotation émotionnelle) déjà alourdie par la vitesse.

Un conducteur immobilisé ou roulant à vitesse très faible possède normalement un champ visuel de 180°. À 90 km/h, le champ visuel est réduit de moitié parce que le cerveau humain peut seulement traiter un nombre limité d’informations à la fois.

 

Or, plus la vitesse du véhicule est élevée et plus le cerveau reçoit d’informations. Il est donc forcé d’éliminer certaines données périphériques.

 

La « charge cognitive », c’est-à-dire la quantité d'attention consciente mobilisée sur une ou plusieurs tâches, est à double tranchant. Lorsqu'elle est trop élevée, on a vu qu’elle peut déclencher une « cécité d'inattention » mais c’est aussi le cas pour une charge cognitive trop faible : quand un individu accomplit une tâche routinière, il a tendance à se mettre en pilotage automatique et à cesser de percevoir des repères clés de son environnement.

Outre la cécité d’inattention, les partisans de l’interdiction pure et simple du téléphone au volant visent une autre cible, ce qu’ils appellent le mythe du « multitasking ». Conduire un véhicule et parler sont deux tâches intellectuelles. Et pour eux, l’idée très à la mode selon laquelle certaines personnes sont capables d’effectuer en même temps plusieurs tâches nécessitant de la concentration est une fiction.

Le cerveau peut jongler très rapidement entre plusieurs activités, mais ce séquencement n’a que l’apparence de la simultanéité. En réalité, le cerveau n’exécute qu’une action à la fois. En jonglant de tâche en tâche, son attention jongle aussi et ces allers retours ont un coût en terme de concentration cérébrale que les neurosciences sont capables aujourd’hui de voir et de calculer.

 

Des similitudes de comportements sont à noter lorsque le conducteur est en prise directe avec la route de nuit ou par temps de pluie. Le temps de réaction est décuplé la nuit… La signalisation horizontale réfléchissante permet une anticipation des réactions et permet au conducteur de visualiser (dans le cerveau) le tracé routier.

Ainsi, aucune technologie, sauf celle toute simple de couper son portable, ne peut remédier à cet usage du portable et aux limites du cerveau humain...

 

 

Notre conducteur « multi-task » au téléphone tente d'éviter un obstacle sur la chaussée et quitte la route…

L’ABS du véhicule prend le relai pour le freinage trop fort (qui est là-aussi un réflexe) puis l’ESP essaye de stabiliser le véhicule… Scénario probable à faible vitesse, mais au-delà de 50 km/h il est peu probable que l’impact avec un obstacle latéral soit évité.

Dans ce cas, les équipements de sécurité routière tels que les glissières de sécurité assurent une fonction de "dernier rempart", diffuse l’énergie cinétique du choc et redirige le véhicule vers la chaussée.

Il est donc incohérent pour un gestionnaire de voirie de parier uniquement sur les technologies nouvelles pour remédier à l’erreur humaine et aux sorties de route…